Melissa




Prénoms : Antonio
Date de naissance : 20 Décembre 1942
Lieu de naissance : Al monaster Real de Huelva, ESPAGNE
Situation familial lors de son exil : Futur marié
Métiers avant l’exil : Chômage et travail au noir
Métiers après l’exil : Ménage à la préfecture de police et travailleur chez Renauld, Citroën
Date de l’exil : 11 Avril 1968
Retour au pays d’origine : 10 Décembre 2009
Lieu de départ : Barcelone, Espagne
Lieu d’arrivé : Paris, FRANCE
Raison de l’exil : Manque de travail
Transport utilisé pour l’exil : Le train
 

Cela fait maintenant 40 ans, je dis bien 40 ans que je suis officiellement parti d'Espagne dans un train dont le bruit ainsi que les pleurs de ma chère Isabelle me hante encore.
J’habitais à Alaja, un petit village de la province de Huelva en Espagne avec ma famille. Nous étions pauvres et nous n’étions jamais allés à
l’école car il fallait travailler dans les champs et garder le troupeau de chèvres. Cela ne suffisait pas pour nourrir sa famille. La vie en Andalousie était très rude et le pays était sous dictature franquiste ce qui ne rendait pas les choses faciles. Mon frère aîné n’en pouvait plus de cette vie « de survie ». Il n’y avait pas d’avenir dans ce village, alors nous prîmes la décision de partir à Barcelone, ville industrielle où les probabilités de trouver un travail étaient plus grandes. Mais hélas pas grand-chose ne s’offrit à moi.
Là-bas, je retrouvai un ami avec qui j’allais souvent au même petit café de notre quartier. C’est là-bas que je l’ai rencontrée, elle avait un joli chignon qui me laissait une jolie vue sur son visage encore d’enfant. C’était Isabelle, elle était accompagnée de ses parents alors je n’osais pas aller la côtoyer. Elle était devenue en quelques instants ma raison de vivre, je voulais me battre pour elle. Je demandai alors au serveur qui était t’elle. Il me traita de fou et me dit qu’elle était trop jeune pour moi. Je partis alors déçu, mais je n’avais pas abandonné. Plusieurs jours passèrent et je me rendis au café. Elle était là avec ses parents. Je pris alors mon courage à deux mains et mit du flamenco dans le café pour mettre un peu d’ambiance. Son père était content, il aimait le flamenco tout comme moi. Puis quelques jours après cela, une fête foraine eu lieu. Pas trop sûr de moi, je l’invitai à sortir, et elle accepta à ma grande surprise. Nous montâmes dans les auto-tamponneuses, puis nous allâmes au stand de tir, puis après avoir tiré quelques fois, je lui offris la poupée que j’avais gagné avec tous les efforts du monde.
Mon ami que j’appréciais tant avait trouvé un travail à Lyon, et me conseilla de partir en France car c’était un pays qui offrait à cette époque beaucoup de travail et qui recrutait beaucoup de main d’œuvre venant de l’étranger. Je décidai d’immigrer et pris alors un baluchon et le remplit de peu d’affaires que je possédais. Isabelle m’accompagna jusqu’à la gare. Elle pleurait comme si on lui avait arrachée le cœur, pendant quelques minutes je me remis en questions : « devais-je vraiment partir ? », « N’allait t’elle pas se trouver un autre homme qui lui ne l’abandonnerait pas ? ». Le train arriva et je montai très rapidement. Je n’en pouvais plus de voir le visage d’Isabelle plein de larmes. Le voyage se fit long. Une fois arrivé à Paris je trouvai un travail dans une usine automobile « Citroën ». Chaque jour, je pensais à ma bien aimée et cela me donnait des forces pour mettre encore plus d’argent de côté car mon objectif était désormais de faire ma déclaration d amour à isabelle et faire ma demande en mariage.
Un seul appel téléphonique suffit pour faire résonner un OUI.
Je courus alors demander à mon patron 10 jours de congés pour retourner à Barcelone et me marier. Lorsque j’arrivai à Barcelone elle était vêtue de la plus belle robe qui fût. Nous échangeâmes nos vœux le 6 avril 1968. Elle avait 17 ans et moi 24. Et nous fîmes nos adieux à sa famille et partîmes à Paris. Le retour le 11 avril fut difficile et Isabelle pleurait comme une madeleine. Une fois à Paris, nous louâmes une chambre meublée. Nous n’avions que l’équivalent de 100 euros sur nous mais heureusement nous trouvâmes vite des ménages à faire. Mais l’ambiance de la ville était effrayante car Paris était en révolte, les étudiants et ouvriers manifestaient et les pavés des rues volaient sur la tête de la police. Nous qui avions connu la dictature en Espagne et qui avions décidé de partir pour un « monde meilleur », nous étions affolés d’avoir fait un si mauvais choix. Ce climat provoquait en soi beaucoup de doute et ma femme ne pensait plus qu’à repartir auprès des siens. Désespérément, je lui demandai de prendre son mal en patience et parvint à la convaincre de ne pas fuir. Puis un jour, un homme travaillant avec moi m informa qu’une loge au 7 rue des Ternes dans le 17eme arrondissement de Paris se libérait. Cette la parfaite opportunité pour Isabelle car on nous proposait un logement de fonction. Nous nous y installâmes tant bien que mal. Isabelle pris des cours de français et tout rentra dans l’ordre. Le calme finit par régner et nous primes nos repères dans ce nouveau pays qui nous offrait tant de belles choses. Arriva la naissance en 1972 de notre 1er fils, Jose-Antonio. Puis 23 mois après notre second fils, Tomas.
L’intégration en France se fit rapidement et d’autres portes s’ouvrirent. Un logement plus grand dans le 6ème où nos enfants grandirent et furent scolarisés.
Immigrer c’est pas facile car on se détache de ses racines pour s’enraciner dans une terre inconnue. Tout est à refaire : trouver du travail, se faire de nouveaux amis, apprendre la culture du pays, …
Puis lorsque j’ai pris la retraite, nous sommes retournés en Espagne, un second exil qui a eu lieu le 10 Décembre 2009. Le retour dans son pays d’origine est aussi difficile que le départ car vous laissez toujours des souvenirs, une partie de vous-mêmes.  Toute ma vie j’ai travaillé de façon acharnée dans l’espoir d’une vie meilleure. Et je suis heureux que la France ait été cette terre d’accueil.

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